Om LETTRES D¿UN VOYAGEUR
oins travaillé que ces deux volumes de lettres écrites à des époques assez éloignées les unes des autres, presque toujours à la suite d¿émotions graves dont elles ne sont pas le récit, mais le reflet. Elles n¿ont été pour moi qüun soulagement instinctif et irréfléchi à des préoccupations, à des fatigues ou à des accablements qui ne me permettaient pas d¿entreprendre ou de continuer un roman. Quelques-unes furent même écrites à la course, finies en hâte à l¿heure du courrier et jetées à la poste, sans arrière-pensée de publicité. L¿idée d¿en faire collection et de remplir quelques lacunes m¿engagea, par la suite, à les redemander à ceux de mes amis que je supposais les avoir conservées ; et celles-là sont probablement les moins mauvaises, comme on le comprendra facilement, l¿expression des émotions personnelles étant toujours plus libre et plus sincère dans le tête-à-tête qüelle ne peut l¿être avec un inconnu en tiers. Cet inconnu, c¿est le lecteur, c¿est le public ; et s¿il n¿y avait pas, dans l¿exercice d¿écrire, un certain charme souvent douloureux ; parfois enivrant, presque toujours irrésistible, qui fait qüon oublie le témoin inconnu et qüon s¿abandonne à son sujet, je pense qüon n¿aurait jamais le courage d¿écrire sur soi-même, à moins qüon n¿eût beaucoup de bien à en dire. Or, l¿on conviendra, en lisant ces lettres, que je ne me suis jamais trouvé dans ce cas, et qüil m¿a fallu beaucoup de hardiesse ou beaucoup d¿irréflexion pour entretenir le public de ma personnalité pendant deux volumes.
Vis mer